Nos gammes sont complémentaires et répondent à une demande non satisfaite par les marques européennes et japonaises

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M.France Ducreux est un fin connaisseur du marché automobile Algérien. Il a occupé le poste de directeur commercial pendant trois ans chez Hyundai Motor Algérie avant de rejoindre le groupe CFAO au Gabon. De retour en Algérie, M.Ducreux se retrouve à la tête d’Asian Hall (CFAO) qui distribue uniquement des véhicules chinois. Avec cette particularité, notre interlocuteur s’efforce à déployer ses énergies et son expérience afin de réussir un challenge de taille : celui de développer des marques chinoises avec des ‘’process’’ d’un groupe automobile de renommée mondiale. (Propos recueillit par Hamid A)

– auto-utilitaire.com : Après votre passage de trois ans chez Hyundai Motor Algérie, vous avez quitté le pays pour rejoindre le Gabon, pouvez-vous nous parler brièvement de votre expérience au Gabon ?

– M.France Ducreux : Au Gabon j’étais en charge des marques, Peugeot, Nissan et Suzuki au sein du groupe CFAO que j’ai intégré après avoir quitté l’Algérie. C’était une expérience enrichissante. Le marché n’était pas du tout le même en terme de volume que celui de l’Algérie, on sais que le marché Algérien est l’un des plus grands marchés du continent alors qu’au Gabon il était beaucoup plus restreint.

Dans ce pays on commercialisait plutôt du matériel dédié à des professionnels, notamment ceux exerçant dans l’industrie pétrolière et dans la production du bois, c’est complètement différent du marché Algérien. L’intégration du groupe CFAO m’a permis de connaître les processus de gestion qui sont typiques à ce groupe et la charte client avec notamment le ‘’process client’’ qui expliquait comment gérer la relation avec le client, c’était assez intéressant.

Je suis revenu en Algérie depuis le mois d’août 2008 avec un grand plaisir, c’est un marché plein de Challenges, un marché que j’affectionne particulièrement. L’Algérie est un beau pays. J’espère que l’expérience que j’ai acquise au Gabon me permettra d’être plus performant, donner plus à la société et mieux servir les clients.

– Comment avez-vous trouvé le marché Algérien après votre retour ?

– Je n’est pas vraiment quitté le marché automobile Algérien puisque depuis mon départ j’ai suivi l’évolution du marché grâce notamment aux différents supports médiatiques, comme auto-utilitaire.com, qui m’ont permis de toujours être proche du marché. Le constat global que je peux faire est que le marché automobile en Algérie est arrivé à un niveau de maturité assez important grâce à une meilleure reconnaissance des clients, aux réseaux de distribution qui se sont énormément professionnalisés et une organisation qui commence à se tisser entre les pouvoirs publiques, les concessionnaires et les clients afin d’améliorer le service.

Nous sommes maintenant dans un marché de plus en plus professionnel. Je l’ai déjà évoqué en 2005 et c’est une concrétisation. Certes, il y a beaucoup de choses à faire en Algérie du fait que le marché automobile est encore jeune, des progrès sont attendus de la part de tout les acteurs et c’est en bonne voie d’autant plus que la croissance est là à tous les niveaux. Il faut que l’on sache gérer cette croissance.

– De nombreux groupes automobiles s’orientent aujourd’hui vers la distribution des marques Chinoises, quel constat faites vous sur cette nouvelle donne ?

– Il est vrai que les marques chinoises sont relativement nouvelles en Algérie. Leur introduction remonte à 2004 pour les acteurs les plus anciens, c’est à l’image de l’économie chinoise qui commence à se développer à travers le monde.
C’est vrai que l’Algérie est précurseur dans ce domaine. Actuellement nous avons presque tous les distributeurs des marques chinoises pour avoir des gammes complémentaire, même dans ce domaine en s’aperçoit qu’il y a des évolutions qui ont été faites du fait de l’approche de nos partenaires Chinois qui se sont rendus compte que c’est un marché très professionnel qui demande donc beaucoup d’exigences. Je dirais que c’est entrain de s’améliorer, après je dirais que cela évolue différemment sur plusieurs niveaux.

– Pouvez-vous nous présenter Asian Hall ?

Asian Hall fait partie du groupe CFAO, un groupe qui distribue plusieurs marques automobiles et différents produits (utilitaires légers, poids lourds, véhicules légers…) à travers plusieurs pays. Asian Hall a été crée en 2006 en Algérie, son objectif est d’apporter un service équivalent à tous les produits que nous distribuons.

L’existence d’Asian Hall est intervenu après un constat reposant sur le fait que de plus en plus de produits asiatiques sont présents dans le marché couvrant plusieurs segments et qui sont appelés à se développer encore plus puisqu’il y a une demande au niveau de la clientèle. Nous répondons à une demande qui est bien précise notamment dans le domaine des véhicules utilitaires où nous proposons un bon rapport qualité/prix.

Dans ce segment (VU), le marché a connu l’offre européenne puis japonaise avant que les marques coréennes fassent leur entrée. Maintenant le marché connaît une forte présence de marques chinoises dans ce segment automobile.

Notre objectifs n’est pas de rentrer en concurrence directe avec les marques existantes sur le marché, nous somme complémentaire par rapport aux différentes offres, je prends par exemple la gamme des minivans avec des charges utile de 500 à 600 Kg ou des minibus de plus de sept places, ce sont des véhicules qui n’existaient pas chez les constructeurs Européens, Japonais ou Coréens, ce type de produits, du fait de la taille des villes où l’on constate de plus en plus d’encombrement, répondent rapidement et correspondent vraiment à la demande des clients. C’est une demande complémentaire, on ne vient pas pour concurrencer des produits qui existent, nous offrons quelque chose de différent et de complémentaire.

C’est vrai que sur les camions des gammes intermédiaires et des gros tonnages nous sommes en concurrence avec les marques traditionnelles, mais nous offrons des prestations différentes, nous offrons un rapport qualité / prix plus intéressant. Actuellement il y a une activité intense chez les PME/PMI qui sont entrain de se développer, le jeune entrepreneur n’a pas forcément 1.5 millions ou 2 millions de dinars pour démarrer son activité et c’est l’à qu’intervient l’alternative qu’offre la marque chinoise (en étant moins chère) qui va lui permettre de démarrer son activité et de travailler rapidement. Si on regarde bien dans la composante de notre clientèle, on voit bien qu’elle est majoritairement composée de PME/PMI et d’artisans qui, grâce à nos produits, peuvent travailler rapidement et bénéficier d’un rapport qualité/prix très intéressant. Notre objectif n’est pas forcément de répondre à la demande de grands compte et les grandes sociétés, mais c’est de travailler avec les gens qui ont besoin de leurs produits immédiatement.

Les ambitions d’Asian Hall sont déjà d’offrir un service de qualité à nos clients aux normes réglementaires et de tisser un réseau de 20 à 25 distributeurs sur le territoire national. Pour la société Asian Hall, l’Algérie est précurseur, elle existe aussi au Maroc, en Angola et au Nigeria, mais cette approche est développée grâce à l’Algérie dans lequel notre concept marche bien de par sa structure et son dynamisme.

Il est vrai que nous sommes dans le focus de notre maison mère puisque que l’on doit montrer l’exemple. La réussite d’Asian Hall Algérie servira de moteur pour d’autres parties d’Afrique et cela nous permettra d’exporter l’expérience de notre développement, c’est intéressant à ce niveau là et c’est vrai que c’est un grand challenge.

– Quelles sont les marques que commercialise Asian Hall en Algérie ?

Je vais commencer par la marque Baw (Beijing Automobile Works) qui est un constructeur spécialiste du pick-up et du camion léger. C’est l’un des fournisseurs de l’armée chinoise. Le pick-up Baw développe une motorisation de marque Mitsubishi, c’est un véhicule de qualité qui présente un bon rapport qualité/prix.

Aussi, nous commercialisons les véhicules de la marque Wuling qui est une filiale du groupe SAIC, un constructeur qui est en partenariat avec l’américain General Motors (actionnaire à hauteur de 17%). Wuling produit particulièrement des véhicules de la gamme ‘’mini véhicule’’. Une gamme qui est peu connue en Algérie composée de petits pick-up, 400,500, 600, 700 kg jusqu’à 1000 kg de charge utile. Il propose aussi des mini bus de sept, huit places et plus … Wuling détient en chine une part de marché de 50% dans ce segment, il devance Hafei et Chana.

Wuling a bénéficié de l’expérience GM en terme de processus de fabrication, de logistique en terme de gestion des pièces de rechange, de suivie et de formation.

Pour terminer, nous commercialisons aussi la marque DFAC qui est une filiale de Dongfeng, Elle dispose de différents partenariats en Chine notamment avec Peugeot, Citroën, Honda, Kia, et d’une joint venture avec Nissan. Dongfeng est spécialisé dans les camions de gamme intermédiaire et dans les gammes Pick-up et propose aussi des modèles dans la gamme camions 6×4. C’est une marque de très bonne notoriété en chine, d’ailleurs les entreprises chinoises présentes en Algérie ont une préférence pour cette marque.

– Allez-vous vous élargir à d’autres marques chinoises ?

Nous allons nous élargir à d’autres modèles sur les marques déjà commercialisées par Asian Hall, nous allons lancer des nouveautés dans la gamme des mini véhicules, des camions légers de marque Dongfeng.
Asian Hall est assis sur les marques citées et son développement est prévu uniquement sur elles. Nous avons des accords avec nos partenaires en termes de distribution, de formation, d’après vente… Nous n’aurons pas à faire venir un nouvel acteur qui en plus ne répondrait pas forcément à nos exigences, c’est pour cette raison que de 2006 à 2008 nous étions relativement discrets, nous voulions asseoir des partenariats très forts avec nos fournisseurs.

Avec nos gammes composées de mini véhicules, de camions intermédiaires et de camions, je dirais qu’on à aujourd’hui ce qu’il faut

– Comment comptez-vous vous différencier par rapport aux autres distributeurs de marques chinoises qui opèrent en Algérie ?

On a effectué un démarrage ‘’step by step’’. Marche par marche, étage par étage. On a pris de temps nécessaire pour négocier avec nos partenaires chinois pour avoir des produits de qualité que nous souhaitions. A titre d’exemple, nos pick-up sont équipés de moteurs Isuzu, les camions à benne (6×4) sont équipés de motorisation véritables Cumins et de boites de vitesse du constructeur Allemand ZF. Ce que nous recherchons, c’est de pouvoir proposer un très bon rapport qualité/prix. Le prix bas ne nous intéresse pas mais plutôt un produit de qualité accompagné d’un service de qualité.

Il est vrai que nous disposons de produits moins chers que nos confrères qui distribuent des marques coréennes ou japonaises, ce qui fait la différence c’est qu’au même prix ou à un prix inférieur nous avons un niveau d’équipements supérieur, des motorisations, des boites de vitesse et des systèmes de freinage de grands constructeurs comme Isuzu. La guerre des prix n’est pas notre objectif mais c’est plutôt la guerre du service de qualité qui nous intéresse.

– Les concessionnaires des marques Chinoises dont Asian Hall sont présent presque tous sur la gamme des véhicules utilitaires, pourquoi cette tendance ?

– Les Chinois disposent d’une grande expérience dans la gamme utilitaire. Si on suit le développement de la chine dans les années quarante et cinquante, le gouvernement en place à l’époque avait décidé que pour développer la chine il fallait développer les transports en commun et le matériel utilitaire, donc aujourd’hui les usines chinoises disposent d’une grande expérience dans le matériel utilitaire et dans le domaine du transport urbain notamment avec les véhicules de sept à huit places.

Il y a aussi le fait que le système de vie des chinois qui est un grand pays agricole dans lequel le véhicule utilitaire est utilisé tous le long de la semaine pour travailler et le week-end pour les déplacements familiaux. Les chinois ne réalisent pas seulement un achat de PME/PMI mais aussi un achat pour un usage familial. Les chinois sont exigeants sur ce point et c’est ce qui a fait que ce pays ait une grande expérience dans le segment des véhicules utilitaires.

– Croyez-vous en l’avenir des marques Chinoises en Algérie ?

– Oui bien sûr. Comme je l’ai souligné auparavant, nous sommes dans un segment complémentaire, nous ne sommes pas en concurrence. Notre objectif est d’offrir des produits complémentaires qui correspondent à la demande. Effectivement, les véhicules chinois existent et se développent étape par étape. L’arrivée des véhicules chinois en Algérie est une suite logique car ils répondent à une demande qui n’est satisfaite par les marques européennes, japonaises et coréennes qui sont présentes dans le marché depuis des années. C’est aussi un phénomène qui se développe à l’image de l’économie mondiale.

– Comment voyez-vous le développement de Asian Hall en 2009 au milieu d’une conjoncture difficile (crise économique, taxe, contraction du crédit…) ?

– Il y a des facteurs extérieurs qui font que tout le monde ou beaucoup d’acteurs se posent des questions. Cela dit ça influera forcement sur le développement de Asian Hall mais je suis confiant du contexte général en Algérie qui est très bon, l’Algérie semble être épargnée par la crise qui secoue l’économie mondiale.

Effectivement, l’instauration de la taxe sur les véhicules neufs est une nouvelle donne avec laquelle nous devons faire. Globalement, tous les éléments peuvent jouer sur le développement d’Asian Hall mais vue la politique mise en place depuis l’arrivée de l’entreprise, je peux dire que l‘influence sera faible et ça ne nous empêchera pas d’avancer dans nos plans. Ce que je pourrais retenir d’important dans tout cela, c’est cette situation qui nous obligera à être plus professionnels, plus vigilants et plus à l‘écoute pour mieux servir.

– Quels sont vos actions en matière de service après vente ?

– C’est une question centrale. Le service après vente a des enjeux centraux, comme je l’ai évoqué déjà, nos responsables service après vente vont partir en formation pour trois semaines, nos partenaires chinois vont aussi venir pour compléter leur formation, notre réseau de distribution doit être mis à niveau pour être efficace aux quatre coins de l’Algérie, c’est notre axe de développement. Si l’on veut exister longtemps ce n’est que par le biais de l’après-vente, de la disponibilité de la pièce de rechange… c’est ce qui fera la différence et c’est ce que souhaite le client. « Le client ne se trompe pas», c’est la base de notre métier.

– Une association de concessionnaires automobile existe en Algérie, en l’occurrence l’Ac2a, comptez-vous intégrer cette association ?

– Oui, on est intéressé, c’est un acteur important qui a fait évoluer les choses depuis son existence. Ce cadre permet aussi d’améliorer les relations entre opérateurs et d’avoir une charte de qualité, ce qui nous pose aucun problème puisque c’est dans notre éthique. L’Ac2a est un interlocuteur qui aide à la normalisation et à la régulation de la distribution automobile en Algérie, c’est un point positif, je dirais qu’on est pour à 200%.

– Un dernier mot

– je suis très content de revenir en Algérie, c’est un marché plein de challenges et puis je suis content de l’accueil qui m’a été réservé à mon retour. Pour ma part, ma porte est toujours ouverte à tout le monde : à la presse, aux autorités, aux clients, à nos différents partenaires…vu l’accueil que j’ai eu, je trouve que c’est le moins que je puisse faire. Je suis très confiant pour l’avenir, j’ai vu le chemin parcouru par la distribution automobile depuis 2003, c’est vraiment encouragent, c’est un développement dans le bon sens.