M.Sefian Hasnaoui est l’un des jeunes managers que compte le marché automobile en Algérie, il est à la tête de Nissan Algérie qu’il dirige avec brio et professionnalisme depuis quelques années. Les résultats ne se font pas attendre : leader du marché des 4 x 4, numéro deux du segment des pick-up et troisième sur le marché des véhicules utilitaires. Dans cet entretien, il nous livre à cœur ouvert ses appréciations du marché et les ambitions de Nissan Algérie. (Par Noureddine Abbassen)
Auto-Utilitaire.com : Quels sont vos commentaires sur le marché automobile
local durant l’année 2006 ?
M.Sefian Hasnaoui : L’année 2006 restera une date qui a marqué le marché
automobile Algérien cela par le renforcement de certaines marques leaders, par
leurs investissements et par leurs manières d’aborder le marché et de le
professionnaliser. Il est aussi marqué par l’arrivée d’un certain nombre de
facteurs en provenance de chine qui soulèvent chez la quasi-totalité des acteurs
des interrogations quant à la qualité et à la capacité de distribution sans pour
autant critiquer pour critiquer, car ce sont des acteurs qui peuvent être
performants.
Nous sommes donc devant deux facteurs : entre la nécessité de renforcer la
présence par l’investissement et le renforcement du professionnalisme d’une part
et l’arrivée d’acteurs très mal représentés affichant des tarifs très attractifs
mais sans professionnalisme d’autre part. Aujourd’hui donc, nous sommes dans un
marché à deux vitesses qui est en train de se construire, c’est un fait qui
risque de déstabiliser le marché en terme de références. On se demanderait quels
sont les critères de jugements qualitatifs si on ne parle que de prix ? C’est ce
qui fait aujourd’hui que Nissan Algérie va devoir investir dans le service après
vente et la garantie, on n’a pas le droit d’entamer une autre démarche purement
commerciale au détriment de l’investissement, Nissan nous l’interdira car ça ne
s’inscrit pas dans l’état d’esprit du groupe et c’est ce que nous sommes en
train de faire avec la création de l’association des concessionnaires en 2006
pour établir notre charte interne en terme de qualité et d’obligations envers le
client.
Concernant Nissan Algérie, nous avons réalisé une performance particulièrement
appréciable en commercialisant 4841 véhicules en 2006, légèrement en déca des
5000 unités escomptées à cause principalement du marché des pick-up qui s’est un
peu tassé pendant le deuxième semestre. En dehors de ce segment nous sommes
au-delà de nos prévisions par segment et par produit. Nissan Algérie en 2006
était quand même dans une année de construction ; réalisation et inauguration du
nouveau show room à Alger, ouverture du nouveau site après vente à Rouiba… donc
beaucoup d’énergie et d’argent investis. C’est une année marquée par un certain
flottement dans l’organisation de l’entreprise car nous courrions plusieurs
lièvres en même temps. Tout cela dénote aussi de la capacité de nos équipes à
prendre leurs responsabilités et à gérer les développements de l’entreprise et
je suis particulièrement fier de la direction après vente et commerciale qui ont
fait un excellent travail même s’il y a encore des efforts à consentir afin de
professionnaliser encore plus notre métier.
– Le segment des pick-up est dominé par le Toyota Hilux depuis quelques
années, et les autres constructeurs ont introduit les nouvelles déclinaisons de
leurs Pick-up pour l’année en cours, comment comptez-vous y faire face ?
– Il est vrai qu’il y a une certaine hiérarchie qui est difficile à bouger dans
le segment du pick-up. Même si le marché de ce segment s’est un peu tassé ces
derniers mois, il a quasiment respecté les parts de marché des uns et des autres
par rapport à l’an dernier. Toyota occupe 65% du marché, Nissan un peu moins de
20% et arrivent loin derrière les autres marques.
Vous avez soulevez les nouvelles améliorations stylistiques du Hilux, du L200 et
des autres, c’est indéniable qu’ils sont dans l’aire du temps avec des courbes
intéressantes et de nouvelles motorisations à injection.
Vous savez très bien qu’en dehors de l’Algérie, Nissan dispose d’un pick-up
appelé Navara qui est doté d’un moteur 2.5 DDTi et qui est distribué en Europe.
Le nouveau Navara sera l’avenir du Pick-up utilitaire chez Nissan et Nissan
Algérie en terme d’orientation stylistique. Les raisons de son absence en
Algérie sont d’ordre qualitatives, car le Navara, avec sa déclinaison actuelle
est un pick-up dédié plutôt aux loisirs. Le pick-up Navara préfigure donc ce que
sera la déclinaison future du pick-up utilitaire de Nissan.
Le Navara comme vous le savez est produit en Espagne et est destiné à rouler
dans des conditions plutôt clémentes et peu rocailleuses (routes Européennes).
Son absence sur les marchés maghrébins et subsahariens est dictée par les
ingénieurs de Nissan qui affirment qu’il ne dispose pas du minimum requis pour
circuler dans nos contrées. Si les motorisations sont parfaitement adaptées et
fiables, d’autres éléments tel que le châssis, doivent recevoir des
renforcements adéquats. Il est à signaler aussi que la capacité de production de
l’usine espagnole ne permet pas pour l’instant d’envisager des exportations
supplémentaires, surtout que l’Algérie absorbe entre 90% et 95% des besoins en
pick-up du marché Nord Africain de l’automobile. Aujourd’hui Nissan est en train
de travailler sur une nouvelle usine de production de pick-up qui sera
opérationnelle en 2008, et je voudrais signaler que Nissan est le dernier
constructeur japonais à maintenir au japon la production des pick-up et des
véhicules utilitaires commercialisés en Algérie contrairement à d’autres qui
sous-traitent avec l’Afrique du sud ou la Thaïlande pour la plupart, ceci nous
permet d’offrir à nos clients des produits d’une parfaite qualité. Le pick-up
Navara a détrôné en Europe le Toyota Hilux et occupe la place de leader dans sa
catégorie, ce qui rend d’actualité la possibilité de le détrôner aussi en
Algérie.
Nous avons vendu un peu moins de 600 4X4 doubles cabines en 2006 et Toyota en a
vendu un peu plus de 700 unités, vous voyez que la différence entre le numéro 1
et le numéro 2 est très faible. Nous affichons une croissance très forte et le
style du pick-up Nissan est parfaitement hostile et dans l’aire du temps bien
qu’il sera renouvelé un peu plus tard. J’insisterais enfin que sur le segment
des simples cabines où il y a une seule manière pour s’imposer, c’est d’être
beaucoup plus proche du client et de jouer un rôle local et régional beaucoup
plus important
– Les véhicules Utilitaires occupent une place prépondérante dans les actions
marketing de Nissan Algérie, comment allez vous vous développer cette année ?
– La remarque et à 100% juste. Il faut le souligner, l’un des piliers
fondamentaux de Nissan et de sa croissance d’ici 2011 est le segment des
véhicules utilitaires qui occupe un point fondateur des plans initiés par
M.Carlos Ghosn ; d’abord parce que la gamme utilitaire de Nissan est riche et
variée et sera encore renforcée dans les prochaines années. Je vous rappelle que
nous sommes présents dans le segment des micros bus à 15 places avec le bus
Urvan, les minis bus avec le Civilian, les camions 2.5 tonnes avec le Cabstar,
ainsi que dans celui des camions de 5 à 15 tonnes avec l’Atleon et les pick-up
évidemment. Là nous sommes aujourd’hui absents, par contre, c’est dans le
segment du petit Van de distribution urbaine et je vous annonce au passage que
Nissan lancera un petit Van de distribution urbaine en 2008, cela en dehors de
l’alliance Renault-Nissan, ce qui veut dire que l’on ne reprendra pas un produit
Renault tel que le Cubistar commercialisé en Europe.
Donc nous avons profité de la diversité et de la richesse de notre gamme de
véhicules utilitaires dans un marché utilitaire très dynamique. ll est a noter
que le marché Algérien des véhicules utilitaires et l’un des plus dynamique de
la région et il croit d’une manière très intéressante ces dernières années
Nissan en est le numéro trois. Nous devons ce classement à nos pick-up où l’on
occupe la deuxième position.
Nous sommes monté de front sur toute la gamme Nissan en 2006 en se concentrant
sur des niches. Nous avons développé de front le Civilian et l’Urvan quia eu une
percée extraordinaire en 2006 et avec lequel on occupe la deuxième place de ce
segment profitant de l’arrêt de production du modèle de KIA et de l’attentive de
Toyota. L’Urvan aujourd’hui vient derrière le H100 de Hyundai est on a une très
forte ambition pour l’année 2007 pour réaliser un meilleur parcours, d’ailleurs,
les chiffres de ventes de ce début d’année le confirment. Notre ambition est de
multiplier nos volumes par trois et nous allons anticiper nos
approvisionnements. Donc clairement le segment des véhicules utilitaires est
pour nous d’abord un moyen de mettre en avant toute la qualité de nos produits
dont le marché algérien a besoin afin, non seulement d’assurer une réelle
croissance mais aussi de compenser le manque en motorisations diesel dans nos
véhicules touristiques et enfin compenser le retard de l’arrivée du 4 x 4
Qashqai en Algérie qui ne sera finalement là qu’au dernier trimestre de l’année.
– Il est clair que les marques automobiles traditionnellement connues
souffrent de la présence en masse des véhicules chinois. Il est maintenant très
difficile de dissuader les clients d’acheter un véhicule utilitaire chinois à
cause des prix très alléchants. Comment comptez-vous faire face à cette
situation ?
– On l’estime (véhicule chinois) à environ 10 à 15 % du marché total ; ce qui
est énorme. Avant tout je pense que l’origine des véhicules ne veut rien dire et
n’est pas trop importante mais il faut parler de critère de qualité du produit
et du niveau de professionnalisme du distributeur d’une marque. Donc il y a la
marque, le niveau de qualité et le distributeur qui forment un trio fondamental.
Si la marque n’est pas sérieuse elle ne fera pas un bon produit et si le
distributeur n’est pas sérieux il ne distribuera pas de manière sérieuse le
produit même si c’est une marque notoire. Aujourd’hui qu’est-ce qui fait la
particularité de ces produits chinois ? Ce sont d’abord des marques peu ou
pratiquement pas connues, ensuite c’est des mauvais produits du moins pour la
plupart et représentés par de mauvais distributeurs, il n’y a qu’à voir
l’exposition des véhicules sur les trottoirs, la carence en pièces de rechange,
l’absence de garages et de techniciens formés ni de centre de pièces de
rechange, pas de logistique, pas de formation technique, pas de littérature
technique, voila ce qui fait la base de ce mauvais trio !
Certainement que quelques constructeurs chinois vont émerger dans les années qui
viennent, ils sont déjà en joint-venture avec des grands constructeurs mondiaux.
Actuellement, la Chine compte entre 1000 et 1200 fabricants toutes gammes et
produits confondus du plus au moins sérieux ; c’est donc une réalité du marché,
mais ce qui me fait réellement peur c’est que les règles ne sont pas les mêmes
pour toutes les marques, alors que l’on veut réglementer le métier de
concessionnaire automobile. Il faut déjà poser des bases par rapport à
l’origine, à l’homologation et au minima technique requis pour pouvoir diffuser
un véhicule en Algérie.
Vous avez fait allusion dans votre question aux véhicules chinois qui sont
utilisés juste pour des périodes restreintes dans le cadre de petit projets
limités dans le temps. Il est vrai qu’il est tentant d’acheter un véhicules
utilitaire à 40% ou 50% moins cher que chez les marques reconnues et qu’on
‘’jettera’’ au bout de six mois où à la fin du projet, mais si pendant les six
mois d’utilisation survient un problème technique ou mécanique suite à un défaut
ou une mauvaise utilisation ? il faut considérer clairement que l’investissement
est finalement de l’argent jeté par la fenêtre car il n’y a pas une capacité de
réaction performante qui suit derrière pour faire face aux différentes pannes,
et c’est là toute la différence avec une marque comme Nissan où notre capacité
de réaction est honorable. Mais le souci le plus important dans tout cela, c’est
la perte qu’aurait engendré une panne d’un véhicule utilitaire en argent, en
temps et les retombés sur l’investissement.
– Le Cabstar a subi un restylage de taille, peut-on savoir quand sera-t-il
introduit en Algérie ? Qu’en est t-il de la distribution du Cabstar et du Maxity
(Cabstar badgé Renault) en Algérie ?
– Effectivement, le Cabstar est redessiné et même proposé avec une version
électrique que l’on aura en Algérie vers la fin de l’année. Sa production a
commencé au mois de décembre dernier elle sera destinée dans un premier temps à
l’Europe. Vous savez que le domaine des camions est un domaine moins automatisé
que le véhicule léger, ce qui fait qu’on aura le Cabstar vers le mois de
septembre prochain et bien sur avec les spécifications nécessaires à notre
marché, c’est-à-dire avec un chassis renforcé et une suspension à lames. Donc
des spécifications qui feront le bonheur des clients Algériens habitués à la
surcharge.
Quant au « bric-à-brac », je voudrais avant tout éclaircir une chose : Renault
groupe qui comprend les marques Renault, Dacia et Samsung a une participation de
44.6% dans Nissan. Renault Trucks a une participation d’environ 18% dans Volvo
AB qui est la maison mère de Volvo Trucks, Volvo AB, par l’intermédiaire de
Volvo Trucks a racheté Renault Trucks et Volvo a pris une participation dans
Nissan Diesel dont Nissan Motors et l’actionnaire de référence. Pour résumer
tout cela, je veux dire que Nissan Motors a une alliance à la fois
capitalistique indirecte et produit avec Volvo Trucks notamment pour redéployer
la marque Volvo et surtout la marque Nissan Diesel en Asie où des joint-ventures
communes ont été prises, notamment en chine avec le groupe Dongfeng.
Cela veut dire que nous sommes au milieu d’alliances fortes en terme de produits
notamment sur la gamme Renault Trucks où le camion d’entrée de gamme (en terme
de poids et de spécifications) de Nissan sera badgé Renault et commercialisé
sous le nom de Maxity. Chez nous, Nissan Algérie et Renault Trucks sont deux
entités complètement séparées et les deux camions Cabstar et Maxity seront
distribués séparément.
Il y a lieu de signaler enfin qu’il y a une volonté à notre niveau d’intégrer
Nissan Trucks dans Volvo Trucks cette année, elle se fera dès qu’on aura
finalisé la mise en place des infrastructures nécessaires (locaux, show room,..)